Téléphonie et TV : quand les juristes se penchent sur les fréquences

Multiplication des abonnés, des opérateurs, innovations technologiques... Le spectre des fréquences dévolu aux communications est saturé et la concurrence est vive pour y accéder. Un colloque organisé par deux doctorants de l'Idetcom les 7 et 8 avril aborde le problème sous l'angle économique et juridique : il s'agit d'attribuer aux fréquences leur juste prix et d'optimiser leur utilisation.

Téléphonie, télévision numérique terrestre (TNT), mais aussi télécommunications par satellite, guidage des avions, police, armée... Tous utilisent des fréquences du spectre hertzien pour transmettre des quantités de données toujours plus importantes à toujours plus d'abonnés. Résultat : c'est l'embouteillage. « Les fréquences disponibles sont de plus en plus rares. La demande dépasse l'offre. Face à ce phénomènes, il y a des solutions techniques pour une meilleure utilisation du spectre, mais aussi des solutions réglementaires sur l'allocation des fréquences », souligne Jean-Marie de Poulpiquet.

C'est pour étudier ces dernières que ce doctorat1de la chaire Sirius (lire Exploreur N°3 p22-23) de l'Idetcom (Institut de Droit de l'Espace, des Territoires, de la Culture et de la Communication ), à l'Université Toulouse Capitole, a organisé avec un autre doctorant, Hannes Oehme, le colloque «Le spectre hertzien et son droit» qui se tient les 7 et 8 avril à Toulouse.

Pour les spécialistes invités, il s'agit tout d'abord d'étudier les mécanismes qui permettent de donner un juste prix à ces fréquences. En France, la situation est paradoxale : le spectre hertzien est dans le domaine public. Sa valorisation n'est donc pas évidente. Mais son utilisation est concédée à des opérateurs privés, moyennant redevance, le tout sous l'arbitrage de l’État.

«Une entreprise qui possède des droits sur ces fréquences peut-elle les comptabiliser dans ses actifs ? Les vendre ? Quelle valeur donner aux fréquences pour éviter la spéculation, tout en maximisant les profits et en favorisant l'innovation et le développement des acteurs ? Voici les questions que nous allons aborder », détaille Jean-Marie de Poulpiquet. En comparant notamment les méthodes de valorisation en France, au Royaume-Uni et en Allemagne, qui n'accordent pas les mêmes droits sur les fréquences.

Deuxième préoccupation : optimiser l'utilisation du spectre hertzien, faute de pouvoir l'étendre.«Les innovations, comme la 5G qui va succéder à la 4G, arrivent très rapidement. Il faut donc organiser le spectre hertzien avec des outils réglementaires qui permettent la gestion la plus fluide possible», résume Jean-Marie de Poulpiquet. Les juristes étudieront ainsi dans le détail le rôle de l'ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) qui attribue les fréquences pour la téléphonie mobile, et celui du CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel), en charge de celles de la télévision.

Ils aborderont enfin une solution d'avenir : le partage des fréquences. Aujourd'hui, en effet, une fréquence donnée n'est utilisée que par un seul opérateur. Mais des technologies récentes permettent désormais de partager une fréquence entre plusieurs acteurs dont les besoins ne sont pas forcément les mêmes. De quoi poser des problèmes inédits aux juristes...

Jean-François Haït

  • 1. Chaire SIRIUS - IDETCOM, Université Toulouse Capitole, co-financement du CNES et de l'École doctorale aéronautique et astronautique